
Smoke On The Water
(Précédents articles : 1, 2) LE morceau de Deep Purple, celui que tout le monde connait. Il aura eu un parcours plutôt curieux, les membres du groupe ne se rendant pas compte de son potentiel jusqu’à ce que le public lui-même leur fasse comprendre qu’ils avaient là une pépite !
Il raconte bien sûr l’incendie du Casino de Montreux dont je parlais dans mon précédent article. La violence de l’incendie a particulièrement impressionné Roger Glover qui sortira quelques jours plus tard d’un mauvais rêve avec de la fumée sur l’eau du Lac Léman et cette image poignante lui inspirera le titre de la chanson.
Mais au début, ce n’est qu’un simple riff que Blackmore a composé, un riff tellement simple qu’il ne fait pas l’unanimité. En plus, de manière très inhabituelle pour un guitariste de rock, il le joue avec les doigts, pas avec un médiator, ce qui donne un son très brut, très monolithique. Blackmore a beau constater que c’est un peu comme l’intro de la cinquième symphonie de Beethoven mais jouée à l’envers, personne n’accroche vraiment à ce riff. Ils tentent d’en faire quelque chose lors de leur courte séance au Pavillon, une piste nommée « Titre N° 1 » mais, comme on le sait, la police a juste permis à cet enregistrement d’être fini. Dès le début des vraies séances au Grand Hôtel, Titre N° 1 est oublié, purement et simplement.
Ce n’est qu’à la fin des séances au Grand Hôtel que leur ingénieur du son, Martin Birch, leur fait remarquer qu’il reste 7 mn de disponible dans l’album. Alors le groupe repense à Titre N°1… « Oui, pourquoi pas ? Essayons. » Ce genre de niveau de motivation.
Bien sûr, pour finir le morceau est juste parfait, avec une intro imparable et est intégré à l’album mais il faudra qu’un DJ américain le programme sans discontinuer pour que tout le monde, y compris le groupe, comprenne sa valeur.
Lazy
Les musiciens qui ont créé le hard rock au début des années 70 avaient tous fait leurs classes dans le blues et il y a toujours un peu de blues dans le hard rock de cette époque-là. Lazy en est la preuve éclatante : tout en restant du Deep Purple, le morceau montre clairement d’où viennent les membres du groupe et quelles sont leurs influences. Conçu comme un crescendo, le morceau est captivant de bout en bout.
Space Truckin’
L’image est amusante et probablement rafraichissante en ce début des années 70. Apollo XI n’est pas loin et les êtres humains ont conscience d’être entrés dans l’ère spatiale. Donc, imaginer les Deep Purple faire une tournée dans la galaxie est tout à fait savoureux. L’histoire raconte le groupe en tournée… Mais pas à New York, Osaka ou Baltimore, sur Mars et sur Vénus, dans un camion spatial !
Il est à noter que c’est l’organiste John Lord qui fait seul le thème principal, la guitare n’entre que plus tard. Plutôt que de faire passer son orgue par un amplificateur pour orgue, ce qui aurait donné un son très propre, John Lord a toujours eu l’habitude de le faire passer par un amplificateur pour guitare, et pas n’importe lequel : le Marshall Super Lead 1959, l’ampli type du guitariste de hard rock !
Machine Head : une réussite exemplaire mais un chef d’œuvre qui se paiera cher
A l’époque, la hantise de la plupart des groupes qui commençaient à avoir du succès était que celui-ci ne dure pas. Les maisons de disque jouaient habilement de cette crainte pour envoyer en permanence les groupes en tournée. Tournée, enregistrement d’un disque, tournée… Les groupes ne soufflaient jamais.
Bien sûr, le fun propre au succès et aux tournées maintenait un haut moral dans l’équipe et, pendant quelques temps, tout allait bien. Mais chaque individu a une résistance différente à ce genre de vie et ceux qui vont commencer à craquer en premier vont « aider » incidemment les autres à les rejoindre dans cette voie. Disons que ce genre de vie, vécu trop longtemps, exacerbe les défauts de communication et érode la tolérance face aux différences de caractère.
Deep Purple menait ce genre de vie (tournée, disque, tournée, sans arrêt) depuis quelques années déjà. Le succès planétaire de Machine Head ne va évidemment pas arranger les choses et les tensions et différences de caractère vont exploser.
Dans une interview de 2002, Ian Paice disait : « j’aurais été le manager du groupe et aurais tout vu de l’extérieur, j’aurais simplement dit au groupe : vous arrêtez tout pendant six mois et vous vivez un peu votre vie chacun de votre côté… On a fait tout le contraire »
La prochaine fois : le Chant du Cygne, Made In Japan