L’album Exodus
Les Wailers se retrouvent donc à Londres début 1977 et beaucoup de choses changent dans la vie du groupe. Tout d’abord, ils enregistrent aux studios Island de Londres dans des conditions et des facilités auxquelles ils ne sont pas habitués. Le son est très fouillé, très travaillé, très arrangé, en particulier sur les guitares. La production est très différente des précédents albums. Les arrangements sont somptueux, généralistes, accrocheurs et donnent à penser que les Wailers deviennent les Beatles du Reggae. Ils ont un nouveau guitariste, Junior Marvin, dont l’oeuvre fera date. Carlton Barrett, le batteur, se mets à utiliser abondamment le style de batterie nommé “rockers”, très populaire en Jamaïque.
Accessoirement, le torchon brûle entre Bob et Rita, qui a du mal à lui pardonner sa liaison avec Cindy Breakspeare, une jamaïcaine blanche nommée Miss Monde 1976.
Les morceaux
Exodus : c’est toute l’histoire du peuple hébreu en exode dans le désert mais ce n’est qu’une métaphore pour les anciens esclaves des colonies britanniques qui aspirent à rentrer chez eux en Afrique. Le groove en est réellement hypnotique, grâce notamment au thème imperturbable joué par le bassiste, Aston Barrett, le batteur, Carlton Barrett et le guitariste, Junior Marvin.
Natural Mystic :
The Heathen :
Jamming, une ode à la fête et à la fraternité, avec arrière fond de spiritualité :
Waiting In Vain :
Turn Your Lights Down Low est clairement une chanson en hommage à Cindy Breakspeare et à l’amour que Bob lui porte. Rita refusera de participer aux choeurs dans cette chanson et les deux autres I-Threes devront se débrouiller sans elle. Curieux destin sentimental que celui de Bob Marley… Rita était clairement son âme soeur, au sens le plus pur du terme, y compris celui du Banquet de Platon (le discours d’Aristophane). Et Cindy Breakspeare était clairement l’amour de sa vie… Comment un être arrive à concilier et vivre ces deux réalités contradictoires constitue un mystère.
Quand on a demandé à Rita, bien plus tard, ce qu’elle pensait de cette liaison adultère, sa réponse avait de quoi surprendre : “Nous étions en pleine évangélisation mondiale et n’avions pas de temps à perdre à nous chamailler pour ça”.
Three Little Birds :
One Love/People Get Ready est une ode à l’unité et à la fraternité, valeurs chères au rastafarisme :
Un jalon
Exodus est un album jalon après lequel le reggae ne sera plus jamais le même. Ça cesse d’être une musique “ethnique” pour devenir une musique de portée internationale, touchant tous les publics. Si les Beatles avaient été jamaïcains et avaient joué du reggae…
Seconde conséquence : la religion rastafari obtient une tribune et un auditoire vaste, bien plus vaste que celui que ses premiers adeptes n’auraient pu l’espérer. Quel dommage que la plupart des occidentaux n’aient retenu que deux points : le look et les pétards ! Il y avait bien plus à comprendre et à savoir.
La prochaine fois : l’album Kaya