
Sensation intense de fraîcheur
inaugurée par le regard posé
sur les mille nuances de vert
des foisonnantes et frissonnantes petites herbes
inondant le fond de l’eau vive et claire.
Soudain attirés par un léger craquement
les yeux s’accrochent au mouvement de la roue du moulin,
charme du bois séculaire
offre au paysage une étrange sérénité.
Dans le ventre de la vieille bâtisse
le rythme s’accélère
notre curiosité s’accroît
Y a-t-il anguille sous roche
devant ce tableau ancestral ?
Les grands linges d’un autre temps
réduits en lanières, trempent,
noyés inexorablement par les eaux de la Sorgue.
Les maillets de bois tapent, pilonnent sans relâche,
les fibres disparaissent,
ces déchiquetures de draps emplissent la cuve de cuivre
puis dans le tamis
on présage la transformation…
Dans la forme les débris de chiffons deviennent feuillets,
posés les uns sur les autres sur des feutres de laine
ils s’égouttent –
Immuables gestes renouvelés depuis le XVème siècle
opèrent la magie –
Passée sous presse
chaque feuille est devenue « papier »
que l’on étend sur des simples fils, pour sécher
dans un courant d’air surveillé, contrôlé avec soin.
Quelques jours plus tard, quel bonheur !!
Pouvoir toucher, sentir cette miraculeuse matière
d’un blanc ouaté, de grande qualité
où viendront se poser gravures immortelles,
aquarelles pâles d’une infinie douceur
ou récits confondus de poésie.
Anne-Marie Kierzek




