Un chapeau.
Un chapô.
Le mien ne sera pas du type Sombrero, car je ne veux absolument pas que ses bords, trop larges, fassent de l’ombre à mes lignes, aussi vais-je tenter d’en confectionner un aux contours étroits afin qu’il ne dénature pas le corps de mon texte. Ce texte est né suite au confinement. En effet durant cette période d’introspection, la qualité du silence qui régnait dans ma rue ainsi que le chant des oiseaux, m’ont fait prendre pleinement conscience à quel point les activités humaines nuisaient à notre environnement. J’habite une petite ville balnéaire et durant les sorties autorisées, j’étais à chaque fois impressionné par la transparence de l’eau et par la qualité de l’air. Le monde était à l’arrêt. À l’arrêt ou plutôt au ralenti des humains imbéciles ne sachant parler que chiffres et rentabilité et incapables de comprendre qu’ils font partie d’un tout, d’une planète bleue malheureusement en train de s’étouffer.
Amères sont les larmes mousseuses du lichen. Elles tapissent la terre couverte de poussière d’arbres et de nuits roques dans les entrailles osseuses du monde.
Rêve d’un silence, lame glaçante, trace de sang dans l’angle de l’humanité où sanglote notre futur lorsque celui-ci se construit, se déconstruit, se déchire. Sous la forme d’une dune inaccessible aux hommes il surgit, fantôme dansant sur les décombres humides d’un monde en ruines. Éconduit, sans racines, elle laisse derrière elle la chair des grands arbres aux troncs noueux d’où s’échappe une écume d’égoïsme en bourrasques violentes, à la saveur tiède.
Vent tumultueux, fragile, l’onde du souffle sortie de sa bouche ronge de néant le bois ardent de nos demains incertains sur son passage.
Le mépris humain fait fondre alors une élégante bougie d’un drame sourd sur un tapis de chiffres froissés.
Se consume sur ce champ de cendre la sève de toute vie.
L’eau des fleuves se noircit de pétrole, les mers se creusent dans les abimes de nos égos.
Troublé, non réconforté par la clarté obscure de mes visions, une réalité m’apparait aussi réconfortante qu’un gravier au touché, aussi décousues que les rayons du soleil, pareils aux fils d’une machine à coudre n’habitant pas le jour d’un habit jovial, perturbant l’équilibre des lignes du temps, nocives comme du charbon.
Ces moments de neige sombre qui tombent sous mes yeux font trembler la sève de ma consolation dans ma quête de la fuite de ma réalité sous les regards des feuillages des hommes-arbres nés plumes d’avenir.
Matteo Vergnes, novembre 2020.