Le formidable média d’État russe Ria Novosti, la sainte Russie soit louée, rapporte que Vladimir Poutine vient de promulguer une loi qui instaure un nouveau délit : l’identification du rôle de l’URSS et de l’Allemagne nazie dans la Seconde Guerre mondiale.
La loi prévoit des amendes pouvant aller jusqu’à deux mille roubles ou 15 jours de prison pour avoir « identifié publiquement les actions des dirigeants, commandants et militaires de l’URSS avec les actions des dirigeants et militaires de l’Allemagne nazie et des pays européens de l’Axe pendant la Seconde Guerre mondiale » et pour avoir « nié le rôle décisif du peuple soviétique dans la défaite de l’Allemagne nazie et la mission humanitaire de l’URSS pendant la libération de l’Europe ». Les citoyens pris la main dans le sac (ou dans le tweet) risquent une amende pouvant aller jusqu’à cinq mille roubles ou une arrestation administrative d’une durée maximale de quinze jours.
Pour les fonctionnaires, la loi prévoit une amende maximale de 20 000 roubles en cas de violation répétée, et pour les personnes morales, une amende maximale de 100 000 roubles ou la suspension de leurs activités pendant quatre-vingt-dix jours.
Le 6 avril, la Douma d’État (le parlement russe) a adopté le projet de loi en troisième lecture, et le 13 avril, le Conseil de la Fédération a approuvé la loi. Le sénateur Nikolai Ryzhkov, qui a refusé de voter pour, a déclaré qu’il pensait que les sanctions étaient trop clémentes.
Cette loi a vocation à s’appliquer à toute personne qui irait à l’encontre de la ligne officielle actuelle, et à tous ceux qui voudraient s’exprimer sur les exactions des soviétiques à cette période, celles de Staline, à ceux qui publient des documents sur les goulags en les comparant aux camps de concentration nazis, etc. Malheureusement ils sont légion ceux qui le font, et la comparaison ne demande pas vraiment de forcer l’imagination.
Quant à la « mission humanitaire » de Staline et autres apparatchiks, elle est plutôt l’extrême exception que la norme. Mais ne parlez plus du massacre de Katyn, cette forêt où la police politique des soviets, le NKVD, a assassiné plusieurs milliers de polonais en 1940, polonais dont le seul crime était d’être considérés comme hostiles au communisme. Enfin, si vous en parlez ça pourrait être quinze jours de détention. C’est toujours mieux que 15 ans pour avoir critiqué l’opération spéciale qui n’est pas une guerre en Ukraine et dans laquelle l’armée russe ne neutralise que les nazis grâce à des missiles capables de reconnaitre un nazi à des milliers de kilomètres.