Éditorial du numéro 15 de Rebelle(s) de septembre 2018, par Jean-Luc Maxence
On peut dire que la raison d’être essentielle d’un magazine rebelle comme le nôtre, sous quelque point de vue et dans quelque domaine qu’on l’envisage, c’est d’oser la politique militante et de considérer l’audace comme légitime. Interroger, en cette rentrée automnale, ce qui se dissimule derrière l’apparence liftée du quinquennat présidentiel du couple Brigitte/Emmanuel Macron, revient à exiger toute la lumière sur le sens principiel du cirque médiatique de la « macronie », telle qu’elle nous est imposée aujourd’hui.
Au-delà des postures éculées du « business model » Macron comme l’écrivent Attac et la Fondation Copernic(1), associations dressées contre le pouvoir exorbitant de la haute finance et du despotisme des multinationales, où allons-nous tous comme un seul citoyen sous le charme ? Où nous mène tout droit cette gestion glacée d’un autiste évident surveillé et protégé par une mère symbolique experte en communication pour Paris-Match ou Voici ?
En marche ? Pour quelle Révolution (2) publicitaire de deux balles, pour quel Gavroche du CAC 40 ? En fait, Emmanuel et Brigitte ont instauré, main dans la main, un Parti de gentils adhérents pour un porte-à-porte néolibéral bien préparé n’évoquant jamais les inégalités sociales affaiblissant notre pays et faisant souffrir ses citoyens, mais davantage les cash-flow hasardeux des banquiers d’affaires, les dépôts de bilan cachés, et les pâles sourires des énarques studieux à l’heure de pointe des faillites définitives des « start-up » du désespoir et des privatisations forcées du service public, avec ou sans ordonnances pour réformer de fond en comble la SNCF !
Hélas, force nous est de constater que le progrès social demeure une expression inconnue du mirobolant « plan-com » proposé à nos médias trop souvent envoûtés de beaux mots philosophiques ! Le « nouveau monde » qu’on nous promet sur nos petits écrans a des relents d’Ancien Régime et des élans bonapartistes vétustes. Emmanuel Macron est aussi franc du collier politique qu’il est franc de son éloquence distillée comme l’élixir d’ennui sans fin lors d’un cours à Sciences Po.
Au début de l’an dernier, sur TFI, le Président, symboliste en diable même s’il n’aime guère les francs-maçons qu’il trouve trop spontanément fraternels, a jeté en pâture aux bons citoyens crédules : « Si l’on commence à jeter des cailloux sur les premiers de cordées, c’est toute la corde qui dégringole… » . En effet. Les observateurs d’Attac ont raison : le jeune président Macron en utilisant de telles images pour tous fait semblant d’oublier que les possibilités réelles de suffisamment bonnes conditions sociales et culturelles pour faire un citoyen suffisamment heureux, passent toujours par un bon fonctionnement de ce fameux « ascenseur social » dont le Président Macron ne parle guère ! Vraiment, notre ténébreux Président aurait besoin d’urgence d’une piqûre d’humilité fraternelle et d’un pétard de poésie vivante pour oublier ses origines sociales de bourgeois tranquille, et ses dogmes d’énarque « fort en thème et en réseau» sur le plan économique, pour protéger les plus faibles, les plus opprimés et les plus fragiles de nos compatriotes. Il devrait s’occuper davantage de ce rôle de guide plus inspiré qu’éclairé qu’il doit conserver à l’égard des derniers de cordée afin de ne pas les perdre en route et de ne jamais les laisser tomber dans le ravin !
Trop protégé par la Première Dame, le premier homme du pays peut-il sortir de sa bulle dorée et protectrice et abandonner ses obsessions de timide petit garçon en représentation, en complet veston bien élevé, et « sortir » à l’air libre dans les couches moyennes de notre peuple, prendre un peu de bouteille citoyenne pour trinquer juste ?
Jean-Luc Maxence
(1) L’imposture Macron, Un business model au service des puissants (Éditions LES LIENS QUI LIBÈRENT, 2018)
(2) Révolution, Emmanuel Macron : Réconcilier la France (XO Éditions, 2016)