Épris de liberté, né de rencontres et d’alliances insolites et quasiment miraculeuses, le bimestriel REBELLE(S), dès sa première livraison, s’affiche comme un magazine «pas comme les autres», pour reprendre l’expression de feu Jacques Lacan (in Écrits, Seuil, Paris, 1966, p. 324) quand il souhaita définir la psychanalyse freudienne et isoler l’expérience analytique des autres thérapeutiques.
Même si son format est celui de TIME, REBELLE(S) revendique d’emblée un grand nombre de masques polyphoniques comme autant de personae à travers lesquelles il dialogue avec les publics multiples auxquels il s’adresse, ici et maintenant, en pleine crise de début du siècle, tout en pensant en permanence à la jeunesse à venir.
Comme l’exprime, dès l’ouverture des années 1980, Fernando Pessoa, reprenant ainsi le concept d’éternelle «conjonction des contraires» de Carl Gustav Jung, il nous faut assumer la logique de la contradiction.
Il est vain de chercher à tous prix une synthèse puisque «toute opinion est une thèse, et le monde, par manque de vérité, est plein d’opinions. Mais à chaque opinion correspond une contre-opinion, soit critique, soit complémentaire de la première. Dans la réalité de la pensée humaine, essentiellement flottante et incertaine, tant l’opinion primaire que celle qui lui est opposée sont elles-mêmes instables : il n’y a pas de synthèse, donc, dans les choses de la certitude, sinon seulement thèse et antithèse. Seuls les dieux, peut-être, pourront synthétiser» (in Textes philosophiques, Lisbonne, vol I, p. R-4).
Parce qu’un jour de juin 2015, deux jeunes intellectuels attablés avec moi à la devanture d’une cave à vins, non loin d’une mythique librairie de poésie, en proposèrent l’enjeu, je décidais de prendre le risque de fonder REBELLE(S) revue de réflexions, décalée, baptisée sous le signe du transgressif comme principe et sous l’œil goguenard de Dionysos, ce dieu qui nous enseigne la «pensée sauvage» de la Grèce, et bien au-delà.
En quelques semaines, s’imposa à moi, le poète fou «empêcheur de tourner en rond», l’élan vital qui me fit imaginer le magazine des «hors-sujets» et des «mots-dits/maudits» (le jeu de mots appartient à la philosophe Laurence Vanin qui est de notre tribu comme dirait Michel Maffesoli !).
Joyeusement, j’imaginais un organe de Presse qui ne laisserait rien sous silence, même pas le «gênant» pour la bourgeoisie établie, et proposerait des solutions pour renverser la névrose de notre temps et changer ses paradigmes pour atteindre une certaine espérance post-moderne.
Songeant à mes vieux maîtres hétéroclites (le philosophe de l’action Vladimir Jankélévitch, le chrétien libre et trop oublié Maurice Clavel, l’antipsychiatre Ronald D. Laing, l’agitateur Jean-Edern Hallier, sans oublier Carl Gustav Jung, le frère ennemi de Freud, ou Gilbert Durand, expert en «structures anthropologiques de l’imaginaire», ou même Jean Grosjean, le «défroqué de l’absolu»), je propose un «DOSSIER» inaugural appelé SIGNES DU TEMPS et traitant notamment des mythes modernes de la quête du héros, «Guerre des étoiles» oblige, du symbolique et de l’imaginaire dans notre bel aujourd’hui, de ce que peut être la rébellion post-moderne qui dit NON à tout système étatique, tout en se voulant, jusqu’à la dernière ligne imprimée, insoumise à l’autorité, certes, mais rébellion positive.
S’ouvrant sur un thème brûlant de significations «apocalyptiques», se refermant sur une nouvelle dénonçant la «bureaucratisation excessive de la vie sociale», REBELLE(S) se veut être l’écho d’une génération «au bord de la rupture». Il se cherche avec l’énergie du désespoir de nouveaux modèles identificatoires pour sauver toute la mise du monde et se débarrasser de tout djihad comme «solution» globale ou finale.
En cela, notre magazine REBELLE(S), se voulant antidote inédit aux mystifications de tout ordre et de toute idéologie, se retrouve comme naturellement sous la protection du poète résistant René Char quand il écrivait : «Ce qui vient au monde pour ne rien troubler ne mérite ni égards ni patience». En cela enfin, je reconnais REBELLE(S) comme mon enfant naturel et c’est à vous tous, connus et inconnus, de lui donner longue vie et authentique processus d’individuation.
par Jean-Luc Maxence