La mort du jeune homme de 17 ans tué presque à bout portant et dans une situation qui, à en juger par la reprise vidéo, ne pouvait légitimer une telle réaction de la part du policier, a mis le feu aux poudres dans tout l’hexagone.
Mais si effectivement les poudres sont bien présentes, elles le sont depuis bien des années (rappelons-nous 2005). L’assimilation entre cette révolte d’une extrême violence de la part de certains groupes de banlieusards avec les protestations et la tentative de révolte des gilets jaunes ou des citoyens opposés à la réforme des retraites imposée par le gouvernement Macron est loin d’être évidente. Quoi qu’en disent certains médias alternatifs plutôt suivis.
Alors, à quoi correspondent ces “poudres”? Et comment démêler l’impression complexe et intensément grise que cette situation suscite sur notre psyché? La Gauche répond en indiquant le contexte de durcissement policier qui sévit depuis des années et qui a touché son point culminant dans la répression autoritaire et violente des manifestants contre la réforme des retraites et la construction des méga-bassines, avec un manifestant mort et d’autres dans le coma. Avec le macronisme, la France s’est éloignée de la démocratie car elle a perdu tout contre-pouvoir digne de de ce nom, toute réelle liberté de manifestation et même d’expression (voire la femme attaquée en justice pour avoir critiqué durement Macron). Et le débat parlementaire a laissé place au forçage politique et à l’autoritarisme.
Seulement, les banlieusards, comme dans le passé, s’attaquent à tout : aux distributeurs de cash, aux magasins, aux autobus, aux commissariats de police… Et on ne les voit surtout pas “manifester” quand un des leurs braque et agresse violemment une vieille dame, comme il est arrivé récemment. Donc, il est important de bien distinguer les choses. Car le manque de discernement nuit fortement à l’intelligence. Que celle-ci soit intellective ou émotive. Il y a d’une part les manifestants qui organisent des marches blanches et dénoncent des violences policières inacceptables et pas assez punies, et puis il y a les délinquants pour qui tout motif est bon pour se défouler de leurs frustrations, pour piller, massacrer et prendre du pouvoir. De la graine de mafieux.
Quant à la Droite, elle évoque inlassablement le laxisme du gouvernement qui est effectivement une plaie, car il faut dire que même les délinquants récidivistes réussissent à passer entre les mailles d’une justice dont le filet semble troué de partout par la peur des gouvernants et le manque de place dans les prisons. Seulement, considérer le laxisme comme l’unique cause d’une telle situation est aveugle et ne peut qu’aboutir à d’ultérieurs durcissements et donc augmenter le danger pour la démocratie. C’est un chien qui se mord la queue.
Dans tous les problèmes sociaux il y a toujours au moins deux dimensions qui demandent des solutions différentes et parfois divergentes sur le plan politique. Il y a un aspect immédiat, ponctuel, et un autre à long terme, systémique. Et ce n’est pas l’un ou l’autre qu’il faut affronter et résoudre, mais bel et bien les deux à la fois. Il s’avère donc nécessaire de prendre des décisions qui puissent à long terme améliorer le système, et d’autres décisions qui évitent le chaos dans l’immédiat.
Évidemment, quant un gouvernement n’atteint aucun de ces objectifs, l’échec est total et jette tout le monde dans la confusion. Et c’est justement le cas de l’actuel gouvernement. Des démissions, particulièrement celle du Ministre de l’intérieur, seraient la moindre des choses. Or, il n’en est même pas question. Du moins pour le moment…
Antoine Fratini
Président de l’Association Internationale de Psychanalyse Laïque