Led Zeppelin… Il était une fois un guitariste nommé Jimmy Page. Dans l’antique Albion, sur les rives verdoyantes et sinueuses de la Tamise, il réside sur une péniche, habitat original en cette fin des années 60. Ces quelques mots pourraient nous faire penser au début de Bilbo le hobbit : “Dans un trou vivait un hobbit…”
Mais Jimmy Page n’est pas un hobbit ordinaire. Il est talentueux et plutôt aisé pour un musicien anglais de cette époque. Qui plus est, il est beau, distingué et intelligent. Il voit loin, là où la plupart de ses pairs courent le cacheton ou ploient sous les dettes vis à vis de leur maison de disques. Très jeune, il est entré dans le gotha des musiciens de studio et a joué sur la plupart des titres du Rock anglais des 60’s. Au bout de quelques années, lassé d’être un second couteau, un faire-valoir, il a rejoint un des plus grands groupes anglais de l’époque, les Yardbirds, d’abord au côté de Jeff Beck puis comme leader. Les Yardbirds ne sont plus et Jimmy Page voudrait continuer cette expérience passionnante. Conscient que c’est un management médiocre et une vue à court terme qui ont tué les Yardbirds, il a décidé cette fois-ci de tout prendre en main
Le groupe
Aujourd’hui, il a invité pour le thé trois personnes. Tout d’abord un vieux collègue avec lequel il a souvent travaillé en studio, John Paul Jones. Bassiste émérite, multi instrumentiste et arrangeur hors pair, celui-ci sera un atout essentiel de ce futur groupe. Il a également fait la connaissance de musiciens inconnus qui l’ont fortement impressionné : le chanteur Robert Plant et le batteur John Bonham. Chacun des deux, dans son propre instrument, a une personnalité extraordinaire et c’est bien plus important que d’avoir un chanteur ou un batteur vedette.
Cette “tea party” va très bien se dérouler, les musiciens se découvrant pas mal de vues communes sur la voie à suivre. La première répétition va être révélatrice : sur un simple standard, Train Kept A-Rollin’, tout le monde va comprendre qu’un grand groupe vient de naître.
Le manager
Reste l’aspect business. Grâce aux Yardbirds, Jimmy Page est devenu ami avec un manager du nom de Peter Grant. L’homme est impressionnant, à plus d’un titre. Sa stature tout d’abord, qui le fait ressembler à un ours puissant et féroce. Sa détermination et sa fidélité ensuite, sans failles pour le groupe qu’il a choisi de représenter. Pour comprendre l’importance de Peter Grant dans l’ascension de Led Zeppelin, importance qui fait réellement de lui le cinquième membre du groupe, il faut se replonger dans les pratiques courantes du show biz de l’époque.
C’est un milieu réellement mafieux. Les tourneurs exploitent littéralement les groupes et malheur au musicien qui élève la voix, il peut toujours se retrouver un beau jour au fond d’une ruelle avec le visage ensanglanté. On a dit de Peter Grant qu’il était féroce et impitoyable. C’est vrai, il l’était, mais dans un monde qui ne l’était pas moins. La différence c’est qu’au lieu de se plier aux règles de ce milieu corrompu et mafieux, Peter Grant va élaborer ses propres règles et les faire respecter avec l’aide de ses hommes de main, qui n’avaient rien à envier aux truands qui étaient en face. Désormais, avec lui, c’est 90 % de la recette pour le groupe et 10 % pour le tourneur, à prendre ou à laisser. Et malheur au tourneur qui essaierait de faire une entourloupe, il pourrait craindre pour sa propre santé…
De fil en aiguille, Led Zeppelin va devenir un groupe respecté dans le milieu, des gens sur les pieds desquels il vaut mieux ne pas marcher. Pour finir, tous les groupes du futur bénéficieront de ce bouleversement provoqué par Peter Grant. Le milieu va devenir un peu plus sain et de meilleures pratiques vont s’installer.
Premiers concerts
Sous le nom de New Yardbirds, le groupe va faire une tournée en Scandinavie et commencer à se faire un nom. De retour en Angleterre, pour ne plus s’afficher comme une suite des Yardbirds, Jimmy Page va changer le nom. Se souvenant d’un trait d’humour de Keith Moon, deux ans plus tôt, qui disait que son projet de nouveau groupe allait s’écraser comme un dirigeable de plomb (lead zeppelin), le groupe devient Lead Zeppelin, puis Led Zeppelin sur conseil de Peter Grant car, en Amérique, lead veut dire défoncé.
Dès ses premiers concerts, le groupe fait une forte impression. Son son est lourd, très lourd, entre le Blues et le Hard Rock. L’expression Heavy Metal, créée à l’origine pour la critique d’un album de Jimi Hendrix, sera le qualificatif le plus employé pour caractériser le son du groupe pendant sa carrière. On n’avait jamais entendu un batteur avec un son aussi puissant et monumental. La voix de Robert Plant est tout simplement unique. John Paul Jones donne un support inégalé à la basse et, trônant au-dessus de tout ça, Jimmy Page fait figure de prince noir du Rock ‘n’ Roll, passant allègrement de riffs puissants à des solos débridés comme on en n’avait jamais vu. Le groupe apparaît clairement pour ce qu’il est : unique.
Led Zeppelin I
Consciente qu’il est temps de proposer un disque à son cortège naissant de fans, la bande du dirigeable, encore une fois, ne va rien faire comme tout le monde. Habituellement, un nouveau groupe va chercher une maison de disques qui va lui faire enregistrer quelques singles puis un album. Ne voulant pas réitérer les erreurs des Yardbirds, Jimmy Page va faire tout l’inverse. En le finançant avec ses propres deniers, il va enregistrer et produire lui-même le premier album, ce qui lui donnera un contrôle total sur le résultat final. Et c’est avec un disque enregistré sous le bras que Peter Grant va obtenir un contrat faramineux de cinq ans avec Atlantic Records, une liberté artistique totale et une avance de 200 000 dollars, somme incroyable à l’époque pour un nouveau groupe. Personne n’avait jamais fait ça.
Les morceaux
Good Times Bad Times
Babe I’m Gonna Leave You
You Shook Me
Dazed And Confused
Black Mountain Side
Communication Breakdown
La prochaine fois : Led Zeppelin II