Cette enquête biographique d’Arnaud Ardoin, éditée par Le Cherche Midi, est devenue en fin d’année un événement éditorial. Il y a en effet quelque chose de déchirant, de poétique même derrière ce superbe titre. Ardoin a su évoquer avec émotion et talent un Jacques Chirac sur le déclin et pourtant resté si populaire dans le cœur des Français ! Chirac comme Président a toujours épousé des causes généreuses (défense des Arts premiers, défense des handicapés), il a su avoir un sens de l’amitié large comme ses mains, même s’il fut un coureur de jupons affriolants au grand dam de son épouse Bernadette… Le Maire, je m’en souviens du temps du Centre DIDRO, quand il accordait et expliquait des subventions généreuses pour secourir une certaine jeunesse blessée par les addictions, savait serrer une main avec chaleur et oublier alors qu’il pouvait paraître parfois triste. Mais, avec lui, le cœur parlait spontanément. L’Humain était tout naturellement en tête d’affiche. Et l’écrivain Arnaud Ardoin a su exprimer ce rayonnement communicatif avec finesse. Cet essai se lit d’une traite, il est sans doute le plus évocateur paru depuis longtemps. C’est un adieu qui devrait toucher par delà les habituels clivages politiques. Quand Ardoin écrit (p. 189) : « Jacques Chirac, c’est Bonaparte avec l’âme d’un moine tibétain… », le journaliste cible juste. De même quand il ajoute : « Cet homme qui a dirigé la cinquième puissance mondiale pendant douze ans est, tout compte fait, un rebelle contrarié », il synthétise sa personnalité et nous fait comprendre pourquoi le personnage public fut aimé au-delà de son parti et le sera désormais comme un des grands mythes de l’Histoire de la République.
Jean-Luc Maxence