Lorsque l’on est hospitalisé ou que l’un de ses proches l’est, la famille offre volontiers un cadeau à l’équipe de soins, aux infirmières, mais qui se soucie de la femme de ménage ? Celle qui avec son chariot plein de produits toxiques, a passé sans doute plus de temps dans la chambre du patient.
De la même manière se soucie t-on des femmes de ménage qui travaillent dans les trains ? On les voit passer trainant leurs grands seaux trop lourds mais sait-on par exemple, que chacune peut nettoyer jusqu’à 200 toilettes par jour ; courant d’un quai à l’autre de la gare, elles font chaque jour 24 kilomètres chacune en moyenne !
C’est la réalité du quotidien de ces femmes, « travailleuses invisibles », qu’a observé, pendant plus de quarante ans, Karen Messing, ergonome québécoise, spécialiste mondialement reconnue de la santé des femmes au travail. Elle vient de publier un essai remarquable sur ces travailleuses de l’ombre dont le travail est le plus souvent considéré comme « insignifiant » : caissières, serveuses, vendeuses, balayeuses… Tout le travail accompli par celles qui rangent, trient, nettoient, frottent, récurent, désinfectent… est énorme mais on n’y prête attention que lorsqu’il est mal fait. De plus, les souffrances de ce «petit personnel » sont rarement analysées et restent le plus souvent elles aussi «invisibles». C’est donc dans un contexte de mépris social, et d’indifférence de la recherche sur les risques associés à ces métiers déconsidérés, que, Karen Messing met au grand jour, avec empathie, « l’invisible qui fait mal ».
Martine Konorski