
Libre à chacun de voir ou non une intervention divine derrière l’existence de Deep Purple. Mais, quoi qu’il en soit, on est en droit d’y voir au moins une « logique cosmique » : représentons-nous la musique du début des 70’s comme une galaxie et jetons un œil sur le secteur galactique du hard rock. On voit bien les explosions spatiales de Led Zeppelin. On ne peut qu’être aveuglé par Black Sabbath, ce groupe qui a réussi à transformer la couleur noire en lumière… Alice Cooper et ses provocations… Kiss et ses costumes futuristes… AC/DC et ses frasques d’écoliers… S’il n’y avait pas eu Deep Purple, il aurait existé au milieu de tout ça un immense trou noir prêt à tout aspirer. Deep Purple est le point d’équilibre, le lien entre la virtuosité, les riffs saignants et le bon goût sur le plan instrumental. Machine Head est probablement l’album qu’il faudrait choisir pour faire comprendre à un martien ce qu’est le hard rock car il en est le mètre étalon.
Des débuts peu prometteurs mais des musiciens exceptionnels
On est en 1970 et Deep Purple est un groupe qui se cherche, comme tant d’autres qui, eux, ne parviendront jamais à se trouver. Après un album en concert avec un orchestre classique qui n’a pas atteint le succès sur l’instant, le groupe arrive tout de même à exister dans sa forme la plus fructueuse, la plus créative, celle dite « Mark II », ou deuxième version.
Jon Lord est un virtuose de l’orgue et son bagage classique donne à ses interventions une originalité de haut vol. Au lieu d’avoir deux guitaristes, Deep Purple aura un organiste et un guitariste qui se partageront les riffs. Personne n’avait jamais fait ça et ça donne un son vraiment original à l’ensemble.
Parlons-en de ce guitariste, ce Ritchie Blackmore. Flamboyant sur scène, inspiré dans ses interventions, brillant dans sa manière de s’insérer dans le groove d’ensemble… Disons-le sans ambages : Ritchie Blackmore est l’un des guitaristes les plus impressionnants et les plus originaux des années 70, une décennie qui en a pourtant vu beaucoup… Ritchie Blackmore ne ressemble à personne et personne ne lui ressemble.
On pourrait dire la même chose de Ian Paice, le batteur. Mais où va-t-il chercher tout ça ? Tout en supportant puissamment le groupe, ce musicien à lunettes se paie le luxe de faire des breaks de folie, totalement imprévisibles. Les guitaristes de rock sont connus pour écouter avant tout et surtout les guitaristes. Mais beaucoup d’entre eux, à l’époque, ont envié secrètement Deep Purple d’avoir trouvé un tel batteur.
Roger Glover est un bassiste d’exception, très mélodique et fin dans ses arrangements. Adepte dans les années 70 de la basse Rickenbacker 4001, je n’ose imaginer le nombre de bassistes de l’époque qui ont acheté cette basse PARCE QU’IL l’utilisait. Il est en plus un remarquable arrangeur pour les morceaux de Deep Purple.
Le hard rock, en tant que style vocal, n’existerait pas sans Ian Gillan : il en a défini les bases les plus importantes. Sa présence scénique établit l’équilibre dans la rivalité soliste John Lord – Ritchie Blackmore. Il est et restera LA voix de Deep Purple.
L’album In Rock, une oeuvre de passion
Profondément déçus par les dérives de leur album avec orchestre classique, le groupe veut revenir à une musique immédiate et génère… Un album inattendu !
Il sort le 3 juin 1970, immédiatement suivi par le single Black Night. Ce morceau dévoile ce qu’est le Deep Purple Mark II : toutes les caractéristiques en sont présentes :
Speed King
Ça commence comme un délire psychédélique, improbable, se poursuit par une partie d’orgue qui provoque le recueillement et on arrive au chœur du morceau : un émouvant, grandiose et implacable hard rock, avec en prime une magnifique partie instrumentale :
Child In Time est une grande chanson de l’époque qui résume assez bien l’atmosphère du moment, raison pour laquelle elle a eu autant de succès :
L’album Fireball, une oeuvre de recherche
Le groupe tourne de plus en plus et l’album suivant s’enregistre sur une longue période. Le groupe semble préoccupé par le fait de montrer ce dont il est capable, de prouver sa « légitimité » musicale… Le genre de pensée qui n’a rien à faire dans le rock et dont l’album In Rock était totalement dépourvu, ce qui le rendait finalement beaucoup plus fort. Fireball, même s’il contient quelques bons morceaux, ne laissera de grands souvenirs à personne.
Fireball
No No No
La maison de disque, voyant bien que le matériel enregistré n’a que peu de potentiel commercial, demande au groupe de sortir un single et ce sera Strange King Of Woman qui sera toujours un cheval de bataille pour Deep Purple :
Le bilan
Il n’est pas agréable à présenter, Deep Purple s’étant perdu dans cette œuvre un peu expérimentale. Il est évident pour le groupe (et pour son public) qu’il faut revenir à l’esprit de In Rock.
Une envie se fait jour : enregistrer dans une acoustique de concert et plus dans ces studios insonorisés. On conseille également au groupe d’enregistrer en dehors du Royaume Uni, pour des raisons fiscales… A partir de là, le Destin, la Fortune ou la volonté des Dieux du hard rock va faire le reste, de la manière la plus étrange qui soit.
La prochaine fois : Machine Head !!!