Kurt Gödel (1906-1978) naquit en Autriche-Hongrie et étudia à Vienne, Autriche. Vienne est le lieu de naissance de la psychanalyse et Freud n’est jamais loin des interrogations métaphysiques des corps étranges que sont les matheux. Pas étonnant finalement pour un mathématicien philosophe, qui finit sa vie en soliloquant dans les allées de l’université de Princeton, N.J., USA.
Bouleversant la logique mathématique avec ses « propositions indécidables », Gödel démontra que toutes les vérités ne peuvent être démontrées, et qu’il existe des incohérences qui, elles, peuvent être démontrées. C’est en quelque sorte, pour les maths, l’équivalent du paradoxe du menteur prétendant être un menteur. Celui-ci dit-il la vérité ?
On s’y perd, mais pourquoi s’y retrouver ? Gödel serait-il le premier post-moderne ? En ce sens, préparait-il l’avènement d’une philosophie et d’une sociologie rejetant les systèmes fermés, les utopies globalisantes, qu’elles soient révolutionnaires, scientifiques ou artistiques ? Le 20ème siècle fut bien celui de la rupture. Du théorème d’incomplétude de Gödel à celui d’indétermination d’Heisenberg, la science aura plus contribué à démontrer que le monde était incertain, infini et inconnaissable que réductible à un hypothétique Grand Tout. Tout est donc interrogation. Albert Einstein, dont Gödel fut l’ami et le partenaire des conversations à propos de la théorie de la relativité prétendait que « Dieu ne joue pas au dés ». Jusqu’à plus ample informé ( !), il semblerait que si.
« Mes ouvrages à moi, il s’en faut tellement qu’ils me plaisent qu’au contraire autant de fois que je les réexamine, autant de fois je suis par eux déçu et chagriné. J’ai toujours dans l’esprit une meilleure forme que celle que j’ai mise en œuvre, mais je ne peux pas la saisir et l’expliciter ». Les Essais de Montaigne sur notre table de lecture, plongeons-nous donc dans le soliloque.
Éric Desordre