Visite dimanche de l’expo “L’Odyssée sensorielle” au Muséum d’histoire naturelle de Paris. Promesse d’immersion dans les scènes sans scénario d’une nature XXL, en plans macro. Animaux, insectes, plantes ; sons images, odeurs. Comme maintenant systématiquement dans les lieux d’expositions, attente derrière une sangle déroulable entre deux poteaux d’acier chromé, en haut d’un escalier sombre. Ambiance famille, enfants plutôt très petits, 3, 4, 5 ans.
Feu vert, on peut descendre. Très grands écrans au sous-sol, encadrés de rideaux noirs délimitant les salles. Des flamands-roses nous attendent, ils s’envolent pour nous. Émerveillement. Pourtant, les flamands-roses, on ne peut pas dire que ça nous manque. Sans être des baroudeurs de la brousse, on y est habitués ; on en voit souvent à la télé. Passant de salle en salle dont les parois floues créent une ambiance de nuit tiède et accueillante, les enfants d’abord surpris s’enhardissent. Certains courent sans prêter attention aux images, tout de joie d’être lâchés dans un assez large espace, clos et protecteur, aux limites imprécises. Aux enfants sages, les parents trentenaires ou plutôt quadragénaires expliquent, commentent. Les enfants sollicités demandent, redemandent. Les parents ré-expliquent, re-commentent, etc.
A de rares exceptions près, pas un instant de répit, aucune possibilité d’immersion dans le “sensoriel”. Inattention absolue à ce qu’offre cette création inouïe, d’une beauté sidérante. Appréhension de rater une rationalité, de manquer une occasion d’apprendre pour l’enfant, d’éduquer pour l’adulte ? Rien pour les sens, rien pour l’instant profond. Les parents n’ont pas conscience de la nécessité d’aider l’enfant à légitimement, naturellement se laisser aller pour ressentir. Oublier le monde tel que la société le lui impose afin pour une fois de le retrouver par lui-même brut, puissant, lavé.
Bilan: très positif. Une demi-journée gagnée par des parents exténués. « Cela a plu aux gosses, ça les a bien occupés. Ils seront plus calmes ce soir. C’était très chouette » (de fait, c’est vraiment formidable !)
L’art foudroyant, celui de la nature comme celui des êtres qui la donnent à ressentir est là, sous nos yeux. Quand l’art aidera t-il enfin à sauver le monde ?