Après avoir publié en 1980 « L’Art d’accommoder les bébés, 100 ans de recettes françaises de puériculture », la publication de « L’Art d’accommoder la vieillesse » achève la construction du pont jeté par Geneviève Delaisi de Parseval, psychanalyste et anthropologue spécialiste de la filiation et de la famille, entre les différentes étapes de la vie. L’architecture de ce dernier diffère de la « feuille de route » proposée à l’époque aux mères désemparées face aux conseils de spécialistes d’une discipline de la petite enfance balbutiante. Le registre de ce dernier ouvrage ressort davantage du « journal de bord » de l’autrice sur la fin de la vie. Loin des injonctions pour réussir sa vieillesse et des recettes pour contrôler l’évolution fonctionnelle et cognitive des organismes, la psychanalyste de 82 ans invite à partager une randonnée intime au cœur de sa propre existence. La forme joyeuse du récit n’altère pas le fond de la réflexion, inspirée par quelques emprunts aux meilleures sources, tels Socrate ou Claude Lévi-Strauss, exemptée des mortels poncifs ridés dans laquelle vieilles et vieux sont souvent assignés. La psychanalyste invite à dépasser la lancinante autopsie du déclin et de la décrépitude qui ponctuent les derniers arpents du chemin vers la mort et, sans cacher que ce dernier n’est ni régulier ni prévisible, suggère que chacun s’adonne à une lucide lecture de son existence. Elle rappelle que la vie n’est pas « une courbe en cloche », qu’elle est la somme, plus ou moins contrôlée, de crises et d’accalmies, narcissiques ou fantasmées… Elle souligne que « l’inconscient ignore le temps » et, en helléniste distinguée, que la clé du vieillissement, c’est de ne pas se laisser rattraper par « chronos », mais de jongler avec « kairos ». Pour ne pas trop mal vieillir, elle conseille de rester soi-même et – autant que faire se peut – de continuer à s’aimer, Elle constate en effet que ceux qui ont été assez aimés enfants traversent plus aisément la crise du vieillissement. Mais elle rappelle que cette vision positive ne saurait faire oublier l’angoisse de la mort, qui se laisse mal apprivoiser.