Cette chanson est remarquable, aussi bien pour les Clash que dans l’absolu. Le Rock ‘n’ Roll, depuis ses débuts en 1956, a toujours été un miroir fidèle de son époque. On ne compte plus les chansons / chroniques frondeuses teintées de dérision, d’humour et Rock The Casbah est tout à fait dans cette tradition.
Là où les Clash nous avaient plutôt habitués auparavant à des attaques frontales contre l’establishment et des incitations à l’émeute à peine voilées, dans ce morceau ils vont faire preuve de subtilité et d’humour. Le groove tout d’abord, indéniablement funky, qui va faire de la chanson un grand succès de discothèque. Le batteur Topper Headon en est le seul compositeur. Le morceau est vraiment dansant de bout en bout et son refrain est, pour le moins, fédérateur. Mais c’est dans les paroles, dans le sujet abordé, que les Clash vont faire très fort.
Les paroles de Rock The Casbah
Depuis la révolution de 1979, le Rock est interdit en Iran, comme pas mal d’autres musiques occidentales. La chanson raconte l’histoire fictive d’une bande de fêtards iraniens qui bravent cette interdiction et “font rocker la casbah”. Suite à ce sacrilège, l’Ayatollah ordonne le bombardement des fêtards. Las ! Les pilotes de chasse écoutent du Rock dans leurs radios au lieu d’exécuter les ordres. Tout ça est bien sûr hautement surréaliste mais ne manque pas d’humour.
Le clip
Les Clash vont surenchérir dans celui-ci. Le groupe joue dans un champ de forage pétrolifère, pour bien rappeler que la plupart des guerres au proche et au Moyen Orient, menées ou soutenues par l’Occident sous des prétextes “humanitaires”, ont pour véritable objectif le contrôle du pétrole. Et oui !
Histoire d’enfoncer ce clou, les membres du groupe sont habillés en soldats occidentaux : bérets rouges, bérets verts, soldats du désert.
Dans le clip, il y a deux personnages principaux, que tout oppose : un juif hassidique qui conduit une Cadillac et qui prends en stop un musulman habillé comme un bédouin. Après une période de froid due à tout ce qui les oppose, ils finissent par sympathiser. Ensuite, on part en vrille : ils dansent au bord d’une piscine en buvant du champagne (pas très cacher ni très hallal tout ça !). Ils vont ensuite au concert des Clash et se comportent comme de simples fans, dansant et chantant le refrain de Rock The Casbah, bras dessus, bras dessous. On est clairement dans le délire humoristique mais peut être aussi dans un postulat de paix future entre arabes et israéliens.
Si on lit attentivement dans la Torah le passage où Abraham décide, inspiré par l’Eternel, que ce sera Isaac qui lui succédera comme patriarche des Hébreux, il y a cette petite phrase pour décrire le futur de son autre fils, le patriarche des Arabes : “Et Ismaël donnera naissance à un grand peuple”. Difficile de dire si les Clash avaient conscience de cette Ecriture mais Rock The Casbah cadre complètement avec elle.
Tout ça nous donne un hit irrésistible et dansant, contenant un sujet brulant traité avec intelligence ET humour. En bref, un grand morceau de Rock ‘n’ Roll.