Si on parle du disco à un francophone, il est probable qu’il nommera les Bee Gees, Claude François ou Dalida… Compréhensible, car le disco n’a été qu’un épiphénomène en Europe, même s’il a fait beaucoup de bruit. C’est donc compréhensible mais profondément injuste car les trois artistes cités plus haut, même s’ils ont fait un excellent job en disco, sont avant tout des suiveurs : ils ont repris et interprété avec talent un genre musical qui était arrivé à maturité sans eux et qui existait depuis un bon moment avant qu’ils ne décident de l’utiliser.
Le disco est un genre musical essentiellement afro-américain, du moins durant la majeure partie de son existence et dans ses meilleurs moments.
Eternel paradoxe de la musique afro-américaine : créée de toutes pièces par les noirs puis pillée et dénaturée par le « Show Biz blanc à l’américaine ». Mais là où les Stones n’ont cessé de se revendiquer de leurs modèles (Howlin’ Wolf, Muddy Waters, John Lee Hooker, etc.) et leur ont même créé une deuxième carrière bien plus fructueuse que la première, j’ai cherché longuement une simple interview où les Bee Gees auraient pu dire simplement : « Merci ». Ça aurait été la moindre des choses.
Donc, les acteurs principaux du genre disco étaient noirs, souvent des femmes et parfois des gays. Bref, pas tellement le genre d’idole promue par le Show Biz classique. Il y a bien eu quelques blancs qui ont contribué grandement au genre : le producteur Giorgio Moroder (Donna Summer), le génial Tom Moulton, inventeur du remix et du maxi 45 tours (les versions longues pour les danseurs), Harry Wayne Casey dit KC, le leader de KC and the Sunshine Band, etc. Mais, fondamentalement, il s’agit d’une musique afro-américaine.
Le terme disco (qui vient de « discothèque ») n’apparaitra que vers le milieu des années 70 mais, dès 1973, certains morceaux sont déjà résolument tournés vers la danse et on pourrait les qualifier de proto-disco. Isaac Hayes et Barry White en sont de bons exemples.
En 1971, Isaac Hayes sort Theme From Shaft dont le motif sur les cymbales charleston et la guitare Wah-Wah ne sortent plus de la mémoire après la première écoute.
Barry White, sort en 1973, sous le nom de Love Unlimited Orchestra, un morceau instrumental, Love’s Theme, qui va faire le tour du monde et qui possède déjà tous les attributs du disco : mélange de funk, soul et pop, rythme irrésistiblement dansant, arrangements d’orchestre. Si on devait choisir un début au disco, Love’s Theme ferait parfaitement l’affaire.
Toujours en 1973, The Love I Lost est un morceau remarquable et d’une importance historique car c’est le premier où on entend ce qui constituera les caractéristiques de la batterie disco : grosse caisse sur les temps et une utilisation particulière des cymbales charleston. Une trouvaille du batteur du groupe, Earl Young, qui officiera plus tard dans les Trammps.