Dans le Nouveau Testament, Jésus de Nazareth délivre un message de Paix et d’Amour, sans condition. Tous les évangiles témoignent de sa grande compassion, de sa miséricorde et de sa douceur. Sa vie fut un don, sacrifice destiné à affranchir l’humanité de sa part d’Ombre, à rendre la liberté d’être à l’Homme.
Cependant, certains épisodes de la vie de Jésus de Nazareth, comme celui de sa colère face aux marchands du Temple, amènent à se demander si cette liberté peut et doit être soumise à une autorité religieuse. Dans la force véritable de son enseignement et de son amour, Jésus, le Christ, nous impose-t-il sa Voix, oui ou non ? Et nous donne-t-il vraiment le choix de ne point lui ressembler ?
Le mot même d’autorité provient du latin auctoritas/auctor. L’autorité désigne ainsi le fondateur qui a le pouvoir d’imposer l’obéissance.
Cette notion de pouvoir est légitime. Quoiqu’il en soit, l’autorité de la parole de Jésus de Nazareth semble tout d’abord informelle. En ce sens, Jésus ne faisait pas dans l’autoritarisme. De facto, son crédit émanait du charisme de ses valeurs profondes.
À ce stade de la réflexion, j’entends déjà, sans préjugés, ceux qui ne croient pas, ceux dont l’identité se refuse d’être assimilée à toute forme de dirigisme axé sur des préceptes religieux. Ils ne reconnaissent ni le message christique, ni sa force, ni son rayonnement planétaire.
Mais qui ne sait pas apprécier l’amour qui fait grandir les enfants ? Qui ne dénonce pas avec peine le manque de générosité de cœur de certains parents ? Au bout du compte, l’autorité de Jésus se fonde sur les principes de la morale universelle. C’est une loi évidente pour l’esprit en quête de sainteté. Telle une loi de mathématiques. Aider une personne âgée, porter secours à des malades, semble appartenir alors au bon sens, au savoir-vivre. Or, ce bon sens est l’accomplissement de la loi de Jésus puisqu’il est l’amour de l’autre.
Jesus de Nazareth : l’autorité de ses Pères
Jésus fut le transmetteur direct de la loi de Dieu. Il ne vivait pas pour Dieu, comme beaucoup, mais en Dieu, comme trop peu. Son autorité lui vient de Dieu… Il est le prophète venant appliquer la loi de Dieu autant que l’enseigner. À aucun moment, Jésus ne s’oppose à ses prédécesseurs, Abraham, Moïse. En revanche, selon l’évangile (Mat. 5,17),
Jésus a dit : « Ne croyez pas que je sois venu abolir la Loi ou les Prophètes, je suis venu non pour abolir, mais pour accomplir ».
Ici, on comprend que Jésus de Nazareth refuse de révoquer les lois du père, dictées à Moïse sur le Mont Sinaï. Il ne les révoque pas mais les transcende et les porte à leur perfection, à leur plénitude. Ceci dès son plus jeune âge. Rappelons-nous qu’à douze ans, certainement juste au moment de sa Bar-mitsvah, sa mère le retrouve assis dans le Temple, en train de discuter avec les sages et les rabbins ! Quand Marie lui exprime à quel point elle fut inquiète en le cherchant, Il lui répond : « Ne saviez-vous pas que je dois m’occuper des affaires de mon Père maintenant ? » (Luc, 2,49).
L’autorité par le miracle
Selon l’évangile de Marc, la considération dont il bénéficiait relevait ni d’un pouvoir, ni d’une aliénation. Elle était une puissance d’amour créatrice qui se manifestait dans son enseignement et dans sa parole qui guérissait et libérait. L’accomplissement de la Loi s’opère donc aussi lorsque l’Histoire témoigne des nombreuses guérisons miraculeuses que Jésus obtenait. On pourrait croire aussi qu’en ressuscitant son ami Lazare, Jésus va contre le destin des Hommes, et donc contre la volonté de son Père. Mais Jésus ne fait qu’Un avec Dieu, Il vit dans Son Père et le Père vit en Lui. Et ses décisions ne font pas l’objet d’un commun accord entre Lui et Dieu, mais sont l’expression d’une volonté unique. C’est sans doute cela la vraie communion. « Le Verbe s’est fait chair et Il a habité parmi nous » nous proclame le prologue de Jean. Cette phrase peut définir le sens du mot « incarnation ». Dieu est descendu en effet vivre parmi nous en homme, avec les mêmes besoins que nous. À la seule et majeure différence que le Saint-Esprit lui était offert et acquis.
Il semble que Jésus de Nazareth ne se lassait jamais de soigner, guérir ou exorciser. Son regard et son cœur submergés de miséricorde ne cessaient de rectifier le Mal et les maux qu’Il rencontrait ou qu’on lui infligeait. Souvenons-nous de cette scène où Jésus, pressé dans la foule, déclare : « Qui m’a touché ? » (Luc, 8, 45), alors qu’une femme malade depuis douze années vient à toucher le bord de son vêtement, alors même que tous les badauds le bousculent de toutes parts. Il dit alors : « Quelqu’un m’a touché, car j’ai connu qu’une force était sortie de moi » (Luc, 8,46). Et Il finit même à dire à cette femme, guérie dans l’instant, que sa Foi l’avait sauvée et qu’elle aille en paix. Voilà, me semble-t-il, une démonstration de la prépondérance de la Foi sur le corps, conjuguée à l’autorité miséricordieuse de Dieu. On peut penser que Jésus nous souligne que le simple fait qu’une malade soit venue à Lui en croyant que l’effleurer la sauverait, l’a sauvée ! C’est sa foi, dont sa part unique de Dieu, qui l’a sauvée. Ainsi, à force de miracles avérés, en son temps, des croyants réalisaient, en quelque sorte, leurs propres miracles.
La Sainte Colère de Jésus rebelle
Jésus est amour et douceur. Et cet amour demeure la condition de la Justice entre les Hommes. Entendons le mot de justice dans son sens le plus large, en y intégrant la notion subtile de justesse. En somme, Jésus de Nazareth est un justicier « archétypal ». Lorsqu’il guérit un vendredi de sabbat, des religieux de l’époque s’offusquent en l’accusant de transgresser le règlement essentiel du jour de repos du Seigneur. Jésus leur répond : « Le sabbat a été fait pour l’Homme et non pas l’Homme pour le sabbat, de sorte que le fils de l’Homme est Seigneur aussi du sabbat » (Marc, 2,27,28). Jésus dénonce alors l’orientation fausse que prend le culte à son époque, en particulier quand il arrive à Jérusalem et qu’il constate avec effroi et colère les conditions de la prière exercées dans la « maison de Dieu sur terre », c’est-à-dire dans le Temple de Salomon. Oserions-nous l’imaginer « hors de Lui » dans toute sa perfection et sa paix venue d’ailleurs ? Jésus, le Christ, en a bien « piqué une » légendaire (de colère !). L’apôtre Jean nous la décrit même parfaitement lorsqu’il narre que Jésus se fabriqua un fouet avec des cordes pour joindre le geste à sa parole énervée, lorsqu’Il chassa les marchands du Temple en renversant leurs comptoirs et en jetant à terre l’argent du change.
Jésus fait acte de violence qui semble être en opposition totale avec son message de paix et d’amour. Comment, Lui qui prêchait l’idée utopique de tendre l’autre joue à celui qui vous gifle, a-t-il pu serrer les poings ? Jésus refuse que l’on défigure à ce point le visage de Dieu. Il veut que la prière soit accessible à tous et qu’elle ne fasse pas l’objet d’un trafic. « N’est-il pas écrit que ma maison sera appelée une maison de prière pour toutes les nations ? Mais vous, vous en avez fait une caverne de voleurs » (Marc, 11:17).
Après Lui, on ne peut donc décemment pas faire commerce et encore moins facturer l’amour de Dieu ! On ne marchande pas avec Dieu. En renversant les comptoirs de vente de bondieuseries diverses, Jésus renverse le culte et la religion de son époque. Il procède donc à une destruction partielle du Temple. L’amour du prochain ne s’achète pas. Jamais. Il n’est guère accessible aux riches égoïstes qui soulagent leur narcissisme en émettant par exemple, de nos jours, des virements bancaires en faveur des ONG !
Jésus appuie l’autorité de Dieu. Il la fonde sur son Amour. Il rejette les prières de certains païens destinées à supplier Dieu ou à l’informer. On ne prie pas Dieu pour Lui demander de nous aimer, mais parce qu’Il nous aime déjà. On ne le prie pas pour qu’Il soit avec nous et auprès de nous dans notre vie, mais parce qu’Il EST avec nous. On ne le prie pas pour être pardonné mais parce qu’Il pardonne.
Dès lors, l’autorité de Jésus de Nazareth s’impose sans nuire à notre liberté de choix. Jésus devient l’ange gardien de l’image de Dieu. Or, nous ne pouvons pas prétendre à autre chose que d’approcher l’image de Dieu. Celle-ci est associée au concept religieux kabbaliste du « tsimtsoum ». Ce « tsimtsoum » désigne, en quelque sorte, le retrait total du Créateur de sa Création, qui donne naissance à notre libre arbitre. Ce concept de « libre arbitre », on le sait, permet trop facilement aux détracteurs de Dieu de déblatérer contre Lui. Ainsi, paradoxalement, c’est au nom du plus signifiant des dons du ciel (le libre arbitre justement) que les Hommes renient l’existence de Dieu, un peu comme si nos propres enfants n’apprenaient le langage que pour nous bafouer…