Xavier Dupont de Ligonnes, celui dont on pense qu’il a tué toute sa famille en 2011 avant de disparaitre mystérieusement pour ne jamais être retrouvé nulle part, avait une mère. Jusque-là, rien d’épatant, vous et moi aussi.
Sauf que sa pauvre mère, Geneviève, était à la tête d’un groupe de prière catholique (plutôt conservateur), que les autorités françaises eurent vite fait d’appeler « l’Église de Philadelphie ». Il n’en fallait pas plus pour que la Miviludes, par la voix de son Président de l’époque, Georges Fenech, n’y voit une relation de cause à effet entre le quintuple homicide et l’influence sectaire de la maman catho : « Lorsque Geneviève de Ligonnès crée son groupe en 1960, Xavier est un jeune enfant donc il a très certainement baigné dans une ambiance mystique, très fervente et probablement très anxiogène », déclare-t-il à Europe 1.
L’association antisecte UNADFI (l’Union nationale de défense des familles et de l’individu victimes de sectes) publie alors un communiqué pour annoncer que Geneviève de Ligonnès a bien fondé « L’Église de Philadelphie », qui « comportait de nombreux critères de type sectaires » et avait une « doctrine délirante ». Les médias et leurs lecteurs se régalent : Xavier Dupont de Ligonnes est un tueur dont une étrange secte catholique dirigée par sa mère a lavé le cerveau, c’est très cinématique.
Xavier Dupont de Ligonnes : un tueur sous emprise
C’eût pu s’arrêter là. Mais non, parce que l’affaire Dupont de Ligonnes, tant qu’on ne retrouve pas le Xavier, c’est très vendeur. Au point qu’en 2019, C’est Marlène Schiappa, alors Secrétaire d’État à la Citoyenneté, qui annonce avoir demandé à la Police nationale et à la Miviludes d’enquêter sur « l’Église de Philadelphie » dans le cadre du projet de loi « renforçant la laïcité et les principes républicains » : Elle a demandé aux forces de l’ordre « d’évaluer les nouvelles pratiques, en particulier en ce qui concerne l’Église de Philadelphie, celle qu’aurait créée la mère de Xavier Dupont de Ligonnès », ajoutant « Cette entité a été identifiée dans les Yvelines. Nous voulons quantifier le phénomène, mieux comprendre son fonctionnement et son implantation en France. Il s’agit aussi d’alerter l’opinion ».
La Miviludes, elle, saisit le procureur de la République du Parquet de Versailles, pour dérives sectaires au sein de la communauté de l’Église de Philadelphie, prétendant être au courant de faits « suffisamment précis et circonstanciés ». Le parquet ouvre une enquête préliminaire pour « abus de faiblesse en état de sujétion psychologique visant un mouvement d’inspiration catholique, traditionaliste, radical et apocalyptique » le 24 novembre 2019.
Et voici la pauvre Geneviève et sa fille par la même occasion, qui aurait repris la tête du groupe de prière, suspectées des pires exactions et stigmatisées comme d’horribles gourelles sectaires responsables de l’état de santé mentale fantasmé de leur fils/frère accusé d’assassinat.
Vous vous dites certainement qu’à ce stade, tous ces gens y croient vraiment, à l’histoire de la secte dangereuse derrière le Xavier tueur. Eh bien, pas tant que ça finalement. Parce que l’Unadfi, elle, par l’intermédiaire de Marie Drilhon, sa présidente dans les Yvelines, reconnait qu’en fait, ils savaient que ce n’était pas si grave que ça, mais que ça allait permettre de relancer les affaires (et pourquoi pas les généreuses subventions étatiques dont l’UNADFI raffole) : « Nous connaissons des mouvements beaucoup plus dangereux et larges en termes de recrutement sur lesquels il faut davantage alerter. Cependant, cette histoire très médiatisée peut permettre de relancer la vigilance face au phénomène sectaire. »
Et finalement ?
Ok, tout cela n’est pas très honnête, un peu pas sympa vis-à-vis de la famille déjà sensiblement perturbée par le drame de 2011, mais qu’en ont pensé la police et le procureur, finalement ?
Eh bien, le 3 janvier de cette année 2023, le parquet de Versailles a indiqué avoir classé l’affaire, étant bien en peine de trouver une quelconque dérive sectaire dans ce groupe de prière. Soit nos policiers sont vraiment des billes, soit votre argent, cher ami contribuable, a encore une fois été sacrifié sur l’autel de la propagande.