Nombreuses sont les productions imaginaires qui traitent de la question de l’enfermement carcéral. Ces œuvres culturelles sont devenues étrangement inspirantes et ont même donné l’idée au psychanalyste Frédéric Vincent d’inventer la psychothérapie héroïque.
La prison est l’enfer névrotique que la modernité a engendré pour mieux contrôler et exploiter les individus. On sait que la majorité des sociétés humaines passées ou actuelles (Romains, Grecs, Égyptiens, Aborigènes, Dogons, Esquimaux, Bororos, etc.) ne connaissent pas l’enfermement comme sanction punitive. Par contre, il est intéressant de constater que chez les Guaranis par exemple, l’isolement d’un individu correspond davantage à une épreuve initiatique. On peut contraindre un individu à être enfermé dans un trou, on peut l’attacher à un arbre mais dans un but précis qui est l’évasion. Dans les rites de passage, on prive momentanément l’individu de sa liberté pour qu’il puisse la conquérir par lui-même. La prison moderne n’a malheureusement pas cette vocation initiatique, elle vous prive de votre liberté et ne vous donne en aucun cas les moyens de vous évader. Bien au contraire, le système carcéral renforce constamment ses dispositifs de contrôle et de surveillance afin que l’idée même d’évasion disparaisse de l’esprit du détenu.
L’imaginaire carcéral
L’imaginaire ambiant illustre le succès de ce principe d’évasion. De la Grande Évasion (1963) au Labyrinthe (2014), de Papillon (1973) à Hunger Games (2012), de Papa Schultz (1965) à L’Évadé d’Alcatraz (1979), élaborer un plan d’évasion semble être une idée qui fascine autant les scénaristes d’Hollywood que les spectateurs. Pourquoi une telle fascination ? L’enfermement psychosocial est un sentiment névrotique persistant qui touche tout le monde. À l’image de la prison moderne, la société occidentale s’organise de manière similaire comme l’a justement montré Michel Foucault dans son célèbre « Surveiller et Punir » (1975). À l’ère du numérique, le panoptique de Bentham est devenu un dispositif banal et accepté de tous. Les dissidents de Freud (Gross, Jung, Adler, Reich) ont compris très vite que le sens du monde moderne se situait dans la préservation de la « dissociation névrotique » comme moyen de surveillance et d’exploitation de l’homme. Par contre, l’imaginaire carcéral véhiculé par le cinéma et la littérature nous délivre un message inspirant : « il est possible de s’évader et de regagner la liberté d’être ».
L’enfermement : une épreuve initiatique
Le cycle littéraire « L’épreuve » (adapté au cinéma sous le titre « Le labyrinthe ») illustre à merveille le concept d’évasion héroïque. Le cycle raconte l’histoire d’un jeune de 16 ans, Thomas, qui se réveille complètement amnésique au beau milieu d’un labyrinthe géant dont les murs se déplacent pendant la nuit selon une certaine logique et qui est peuplé d’araignées géantes métalliques. Thomas se réveille parmi d’autres jeunes qui ne se souviennent que de leur prénom et qui ont organisé une micro-société au cœur du labyrinthe. Ces jeunes incapables de se souvenir de leur vie passée à l’exception de leur prénom organisent un mode de survie où les blocards (nom qu’ils se sont attribués) jouent un rôle bien défini. Dans cette tribu, on trouve le groupe des coureurs, ceux qui doivent pénétrer dans le labyrinthe afin de l’explorer et d’en comprendre le mécanisme. Le jeune Thomas est attiré par le labyrinthe et se découvre être un excellent coureur. Pour comprendre ce qu’ils sont et pourquoi ils sont là, Thomas et les blocards vont devoir affronter le labyrinthe et ses minotaures d’acier et surtout réussir à s’en évader. Cette évasion va impliquer des risques et des pertes mais garantir un résultat : une réminiscence, une remémoration du passé et une compréhension de l’ici et maintenant. Ce cycle littéraire est intéressant à plusieurs niveaux, il souligne à quel point nous pouvons être nos propres geôliers. Mais il rappelle aussi que nous possédons en chacun de nous les clefs de notre propre évasion.
Guérir la dissociation névrotique par l’évasion
L’évasion héroïque peut se définir comme un processus d’individuation qui commence par une résistance devant les diktats idéologiques et un besoin d’échapper à toute forme de vie schizoïde. En ce sens, le lâcher-prise (surrender), l’émotionnel, le ludique, l’imaginaire sont les meilleurs alliés dans un plan d’évasion qui sonne comme une progression lente et difficile à travers les 7 stades psychologiques du Moi. S’évader, c’est intégrer ces différents stades dans la construction de sa psyché. Frédéric Vincent a inventé la psychothérapie héroïque dont l’objectif premier est de faire comprendre à l’analysant l’attachement aveugle qu’il peut avoir envers les institutions surplombantes, de lui faire prendre conscience de son propre enfermement mental. Devenu lucide, il peut alors traverser le labyrinthe chaotique du monde soi-disant civilisé, affronter le minotaure technocratique, trouver son trésor intérieur et réussir son évasion. L’évasion héroïque n’a qu’une seule finalité : la guérison de la « dissociation névrotique », c’est-à-dire aider l’analysant à « réunir ce qui est épars » en lui, lui permettre une harmonisation psychique de toutes ses contradictions.
Georges Clastres
Frédéric Vincent en 30 secondes
Dans la continuité des penseurs néo-jungiens (Hillman, Durand, Maffesoli), le psychanalyste Frédéric Vincent a inventé la psychothérapie héroïque qui définit le Moi selon 7 stades ou degrés psychologiques. Ses recherches scientifiques l’ont amené ainsi à développer une nouvelle méthode thérapeutique dont les résultats sont plus que prometteurs.
Pour tout renseignement : www.fredericvincent.fr