
La ville des signes
Samedi 28 septembre. Premier soir à Katmandou. Je déambule dans le fouillis urbain du quartier de Thamel, au sol de terre battue. A tous les coins de rue, partout au Népal, les pelotes de fils électriques noirs d’une densité et d’un volume ahurissants font ressembler les poteaux de bois les supportant à de gigantesques barbes à papa. Pour le coup, à la réglisse. On y voit à toute heure du jour ou de la nuit, perchés sur de grandes échelles, des techniciens de maintenance pris dans leur toile d’araignée interconnecter les câbles dans des concerts de grésillements et de flashs bleutés.
Dimanche, départ pour l’Himalaya. Le premier geste du Bouddha nouveau né fut de marcher sept pas vers le nord. Dans un bus ressemblant à un camion, haut sur roues, nous quittons par le nord un Katmandou pollué et à l’air âcre. Trafic dense de petites Mahindra, de motos 125 et de solides Royal Enfield. Ces rustiques motos vintage présentent l’avantage de pouvoir être réparées à travers toute l’Asie. N’importe quel mécano de coin perdu vous la remet en état en un rien de temps. A la débrouille. En plus, elles ont de la gueule. La quatre-voie sans séparation centrale que nous prenons surplombe un bazar couvert de bâches en plastique bleu jonchées de pneus. C’est le plus grand marché de la capitale, qui en compte beaucoup.
Au milieu de l’entrelacs commerçant, on remarque de nombreuses écoles Montessori. Si Montessori est tendance, c’est aussi et surtout l’assurance pour les parents de pouvoir travailler tous les deux. Les femmes sont de plus en plus nombreuses à occuper des emplois qualifiés et mieux rémunérés. A défaut de crèches, la garde des enfants d’une classe moyenne éduquée et entreprenante passe semble t-il de plus en plus par des institutions prestigieuses, de préférence aux traditionnelles nounous.
Tout est signe. Informations et slogans en sanskrit, visuels pour mille produits colonisent le moindre à-plat vertical de la ville et au-delà : façades, toits, espaces inter-étages des immeubles. Aux carrefours, les panneaux publicitaires de marques concurrentes mettent en scène de jeunes couples à la mine éclatante. Dans une cuisine rutilante, la femme y fait des gros yeux de comédie à l’homme surpris à tenter de goûter avant l’heure le plat familial qu’elle prépare. Théâtre de boulevard. Tomates, lubrifiants, pièces détachées, moteurs, parpaings, tout est proposé sur la voie. Un commerce clame une fière devise à l’attention de ses clients : « Every purchase is a victorious win ». Sur un gigantesque panneau : « German beer now brewed in Nepal ». Cette proclamation déconcertante s’étale au dessus des immeubles de la banlieue, montrant que l’industrie se développe malgré tout, malgré la guerre civile à peine éteinte, la pauvreté endémique, la corruption généralisée, l’incapacité gouvernementale, la violence policière, les tremblements de terre destructeurs. Vu les conditions de vie, tout est courage. Au dessus de la réserve d’un vendeur de chaussures: « Life is hard but not impossible ». L‘arrière-boutique chère à Montaigne est l’humble échoppe d’un cordonnier.

Une route des possibles
Une poussière qui recouvre tout éteint juste un peu les couleurs vives omniprésentes. Les camions décorés ressemblent à des affiches de Bollywood ; sur les pare-chocs, le drapeau brésilien est à la mode. Autocollant, un Bob Marley hilare sur fond de couleurs rastafari en agrémente fréquemment les ailes ou les garde-boues. Les pays de misère et de foi se saluent par-delà les océans. La plus visible, la plus sensible même des qualités des véhicules est leur extraordinaire solidité et capacité à se jouer du terrain; nous n’allons pas tarder à le constater. Dans tout le sous-continent, le camion vedette, de la même marque que notre bus, c’est un Tata. Des milliers livrent la presque totalité du Népal en denrées de première nécessité et matériaux de construction. La Porsche locale, c’est le Tata vide de son chargement, aux ridelles rouges. S’il n’est pas en retard, il est pressé. Dépassant motos, bus et camions chargés, il déboule aux croisements où l’agent de police a bien du mal à discipliner un chauffeur survolté.
Assez rapidement, alors que les faubourgs s’étagent encore le long de la route, nous attaquons les pentes pré-himalayennes. Une statue géante de Shiva surplombe la plaine, totalement occupée par le million et demi d’habitants. Les bidonvilles piquettent la montagne verte. En dépit d’une paix retrouvée avec la prise de pouvoir des révolutionnaires, l’ex-paysannerie des vallées fertiles, vivant d’expédients, n’est pas revenue à ses pré-alpes et gonfle la ville croulant sous les ordures. Les dieux jouent au cricket : grande affiche pour le club vedette de Katmandou. Les champions aussi célèbres que nos stars de football arborent des moustaches fournies et roulent de gros yeux mouillés d’acteurs de Bollywood. Soudain une rizière, d’un vert jaune piquant.
Au bout de deux heures, nous avons bien parcouru vingt kilomètres. Nous quittons l’asphalte disparu sous les pluies, s’il a jamais existé dans ce bout du monde, arrosé par la queue de mousson qui n’en finit pas. C’est l’émission Les routes de l’impossible. Les fondrières sont si profondes que le carter de pont est cogné de tout le poids du camion, ballotté d’un bord pierreux à l’autre. L’arbre de transmission racle le sol de latérite. Pas une fuite d’huile, pas un couinement, pas un sourcil haussé du chauffeur. Sous-marin de la poussière humide, il continue sur sa lancée jusqu’au trou suivant, dix mètres plus loin. Il nous reste cent kilomètres. L’ex-royaume est un chantier permanent. Les tas de briques succèdent aux amoncellements de roches dus aux glissements de terrain. La forêt détrempée surplombant la route laisse échapper des coulées de boue à chaque virage. Au fur et à mesure que nous montons, de plus rares motos nous dépassent mais des myriades de camions les remplacent : des Tata blancs décorés. Le plus exubérant de nos chauffeurs livreurs à la cabine de poids lourd aux couleurs du PSG passerait ici pour un minimaliste conceptuel. Nous croisons précautionneusement les Tata venant en sens inverse. Souvent obligé de manœuvrer finement, la roue à l’aplomb de notre fenêtre à moitié dans le vide, le chauffeur a un œil dans le rétroviseur à surveiller la roue arrière, un autre attentif à la manœuvre du camion d’en-face et un troisième braqué vers le haut de la falaise, d’où risque de dégringoler à tout instant un inquiétant pan rocheux à l’équilibre précaire. Je me fais l’impression d’être Charles Vanel dans le Salaire de la peur, sans le salaire. Une pierre lâchée d’un bras tendu par la fenêtre tomberait directement dans la rivière Indrawatti, cent cinquante mètres plus bas. Tout le long de ses berges, des gravières. La production mondiale de pelleteuses semble s’être donnée rendez-vous dans ces thalwegs caillouteux. Un frelon rentre par une des fenêtres du bus. Les passagers tentent patiemment de le faire sortir en baissant les vitres une à une. Volant au niveau des têtes, l’insecte calme se promène entre chaque siège alors que le bus se déhanche comme un éléphant dansant sur YouTube. Accompagnés du frelon, nos têtes dodelinant, nous rebondissons au même rythme.

Chemins dans la mousson tardive
Arrivée à Helambu, point de départ de nos deux semaines de trek dans le Langtang. C’est la région la plus pauvre et une des plus touchées par les tremblements de terre, en particulier celui d’avril 2015 qui fit disparaître la vie de vallées entières. Les hauteurs écroulées déposèrent sur les villageois des pierres tombales de quinze mètres d’épaisseur. Les traces restent visibles, zébrant les contreforts de leur cicatrices grises.
Netra est notre sirdar. Les sacs sont répartis entre les porteurs. Ce sont des gars du Langtang, comme les sherpas. Jeunes, costauds, souriants, Tamung, Muskar, Bijesh, Rakesh, Pemba, Shakar, Sonam parlent quelques mots d’anglais. Ils nous accompagneront sur la totalité du voyage. Lors des haltes du soir, partageant nos tabacs, nous grelotterons autour des poêles de tôle d’acier trouée. Au prix d’une escalade dans du rocher facile – activité toute nouvelle pour ces forçats des sentiers – et de quelques centaines de mètres de taille de marches dans la neige dure, nous monterons avec eux sur le sommet que nous espérons alors pouvoir atteindre dans quelques jours. Ce sera le modeste Surya Ri, le « Pic du Soleil », 5145m.
Nous voilà partis au travers des rizières qui se succèdent en escaliers aux courbes douces. Chaque nappe étroite est hérissée de ses tiges ne portant pas encore leur grains. Elles sont bordées de parterres de fleurs. Je m’arrête pour photographier la profusion de plantes inconnues. Chiquant un mélange à l’odeur terrifiante, le sirdar joue avec attention les chiens de berger en fermant la marche du groupe. Derrière moi, son souffle de dragon me pousse à avancer plus vite et rejoindre ceux qui ont pris le bon rythme. Isabelle et Franca, copines inséparables, grimpent devant comme des chèvres sauvages. Il pleuvra tous les jours, toutes les nuits. Quelques heures de répit, certains matins, nous permettront de voir les flancs qui nous font face dans des trouées de brume. Les chemins sont vertigineux. Les arbres piquent à l’horizontale les parois que nous parcourons prudemment mais à bon pas. La jungle de ce Népal vert accroche les limbes de la mousson, sa ceinture pluvieuse mollement poussée par le vent. Il va faire nuit. Nous suivons la crête en marchant dans les nuages, entre les pitons mangés de mousse.
Tous les détritus qui jonchent le moindre sentier bien au-delà des banlieues déshéritées de Katmandou nous ulcèrent l’âme. Immergé dans une nature sublime, je finis par ne plus voir que ces paquets de chips déchirés, papiers de friandises, contenants de plastique. Les habitants, eux, ne les voient pas. Ils voient les dieux que nous ne voyons pas. Ils les voient partout où ils se trouvent, c’est à dire partout. Les moines bouddhistes croisés lors de notre ascension nous apostrophent : « Where do you come from ? ». Ils rejoignent quant à eux le sanctuaire de Shéchèn. En toute saison, par tous les temps, ces athlètes parcourent les chemins reliant les monastères, visitant les villages. Ce sont des gaillards bien nourris, impeccablement habillés, voire modeux avec leurs sneakers Adidas de la même couleur bordeaux que leurs toges. Malgré les prononciations difficiles à identifier, Bruno comprend qu’ils travaillent avec Matthieu Ricard. Nous leur confirmons que leur compagnon français a écrit de nombreux livres sur le bouddhisme, qu’il est chez nous très connu et respecté. Le Bouddha est né au Népal. En dépit de ce que shortens et statues de l’Éveillé peuvent laisser penser, plus de 80% de la population népalaise est hindouiste. Même si l’hindouisme est fortement influencé par le bouddhisme, il faut se rendre au nord et plus généralement sur les hauts plateaux pour que le Dalaï-lama soit toujours présent dans les maisons. Il y a là, sur un mur de la salle commune, entouré de bouteilles de bière et de fiasques de whisky népalais, un de ses portraits niché dans l’hôtel votif.

Des singes mouillés aux lacs sacrés
Joie des sangsues qui dansent sur les chaussures, recherchent la peau nue sur laquelle s’accrocher. Sous la ceinture, sur les doigts de pied, les chevilles, nous iront les trouver déjà gorgées. Elles utilisent un anticoagulant analgésique et s’installent tranquillement sans qu’on en sente les morsures, laissant sur le corps des petits trous qui n’arrêtent pas de saigner. Soudain, nous croyons reconnaître des hurlements de chiens. Dans la jungle ? Des singes, sautant d’arbre en arbres. Ils sont moins intéressés par nous que nous par eux. En altitude, dans les lodges* de tôle ondulée, dénuement, pauvreté même. Les toiles plastifiées aux couleurs de U.S. Aid – « Gift from the American People » – doublent les cloisons de bois. Il pleut toujours. Sur les châlits, nos minces matelas seront souvent humides comme des éponges.
Au Surya La – le « col du Soleil », 4610m – vue sur le lac sacré Gosainkunda. A l’origine du monde, les dévas barattèrent la mer de lait. Entre autres merveilles, il en sorti un poison violent. Shiva le but avant qu’il ne se répande et ne détruise tout. Assoiffé et déjà bleui par le poison, Shiva planta son trident dans le sol sec de Gosainkunda. Le lac en jaillit et il put s’y désaltérer. Depuis ces temps immémoriaux, toute l’Inde et le Népal hindouistes se retrouvent tous les ans pour un festival religieux à 4380m. Sur les berges du lac : des milliers de sous-vêtements, slips, maillots de corps, sweat-shirts floqués de réclames pour les bières népalaises. Les dévots se dénudent après s’être baignés dans le lac sacré, délaissant les habits qui ne sont pas bénis. Il n’est pas possible de marcher sur la rive sans poser le pied sur des frusques de tous âges, de toutes époques, sur des papiers d’emballage, restes des offrandes à Shiva. Il est le créateur et le destructeur. Jeter ses ordures par terre est aussi naturel que faire une offrande. Vu la ferveur religieuse de tous, il n’est pas de lieu – villes, campagnes, alpages – qui ne soit sale à nos yeux d’étrangers.

La boîte à rêve
Jeudi en fin d’après-midi, arrivée à Dhunche, la ville importante de la région. Fin du trek. Devant les pauvres étals, entre deux décharges, des paquets de chips gonflés par l’altitude, des vaches placides, des cochons insatiables. Beaucoup de poules dans la rue, pas dans l’assiette. Pendant trois semaines, notre régime aura été composé de riz, pâtes, œufs et rares légumes. Le poulet est un luxe que les Népalais ne transforment en plat que très rarement, pour les fêtes. Un seul volatile fait alors de nombreux jours en cuisine et agrémente de chacun de ses morceaux les recettes habituelles. Dans la rue principale (la seule) de Dhunche, une des nombreuses boutiques vend des graines de millet et du jus de rhododendron qui guérit presque tout: hypertension, maladies de la prostate, insuffisance cardiaque… Sylvie et Laurent, nos amis toubibs, se lancent et achètent les best-sellers de la pharmacopée locale. Nous y allons tous de nos suggestions pour boire les décoctions inconnues. Amertume garantie. A l’instar du Picon-bière, Bruno suggère « le Rhodo-bière ». Dans cette province déglinguée, les chiens en pleine forme aboient toute la nuit. Innombrables, ils étaient tous amorphes dans la journée, couchés sur le côté, les pattes étendues comme des vaches. Au petit matin nous attendent deux tout-terrain pour une longue journée de route le long de la rivière Trishuli, sur un chemin autre, sur des cahots identiques.
Arrivé le soir à l’hôtel, troisième douche en trois semaines et première douche chaude. Avec Georges, nous repartons à pied dans les ruelles encombrées de scooters virevoltants, de chèvres debout et de chiens couchés. Les posters des plus grandes cimes tapissent les murs des échoppes de Thamel. J’avise les cartes de deux régions riches en possibilités d’expés. Une paroi blanche me saute aux yeux. C’est l’Ama Dablam, pas tout à fait 7000m. Je colle mon nez à la photo, tentant de distinguer les passages clés. Quelle allure ! C’est une des plus belles de la chaîne himalayenne. « Ouvrons la boîte à rêves », dit Georges. Il suit du doigt l’arrête sud-ouest qui mène au sommet en trois camps, me regarde en souriant, complice. « Elle était à la mode dans les années 80. Maintenant c’est plus tranquille. Il y a très peu d’expés, c’est plutôt l’Everest qui a la cote. » D’où l’encombrement sous le ressaut Hillary… Je reste à la regarder comme un gamin devant des confiseries. Dans un même souffle, nous clamons: « La prochaine ! ». Lui, légitimement, avec les 8 000m accrochés à son carnet de courses d’alpiniste professionnel ; moi beaucoup plus légèrement, ma liste de courses ressemblant plus à celle que j’emporte au marché de Vincennes le dimanche matin. Je ne serai pas l’Arhat, le « méritant », le disciple qui parvient à l’Éveil. Je ne chercherai pas le Nirvâna, la fin extatique après les vies imparfaites ; le désir me mène encore et me ramènera au pays du Bouddha.

Le président Ping ne rigole pas
Visite du Premier chinois Chin Ji Ping prévue demain. Les calicots et des banderoles célèbrent l’amitié sino-népalaise. Le Népal est le château d’eau de la Chine comme celui de l’Inde : rivalité entre les deux plus grands empires de la terre. Les Népalais sont-ils proches des Indiens, vu les religions, traditions et peuples si mélangés ? Même situé dans la sphère d’influence anglaise, le royaume du Népal resta indépendant aux 19ème et 20ème siècles, surplombant une Inde contrôlée par les britanniques. Lors de la Grande Rébellion indienne de 1857 et à l’occasion de l’indépendance chaotique de l’Inde, le gouvernement royal soutint le pouvoir anglais. Entre le minuscule Népal et l’Inde immense, cela laissa des traces.
Le dernier matin à Katmandou, grand beau. Un escargot a laissé sa trace irisée sur mon slip mis à sécher dehors sur une rambarde. J’ai fait ma lessive la veille, c’était le premier soleil après tant de pluie. A quelques heures de l’arrivée du Président Ping, les flics sont bien là. Les moins menaçants portent leur uniforme de toile verte, leur béret et un long bâton de bois qu’ils tiennent ostensiblement devant eux. De l’autre côté de l’avenue, la police anti-émeute au camouflage de camaïeu bleu est bardée de protections de plastique noir, boucliers rond transparents, casques et fusils à pompe. Ça ne rigole pas au pays des rhododendrons.

Visite touristique de Batan, la vieille cité monastique où les temples de brique et de bois sculpté se succèdent sous nos yeux éblouis. Temple d’or : cour étroite, luxuriance des cuivres. Renfoncements et surplombs ouvragés forment une fractale de vénérations. Les marchandes du temple proposent les lampes à beurre à poser sur les autels ; effluves d’encens, de pisse et de viandes fumées mêlées. Comme nous l’avons fait si souvent, nous tournons à l’intérieur dans le sens des aiguilles d’une montre autour du shorten central, lançant de la main droite les moulins à prières. Le moine au premier étage prend une collation, pas gêné par les quelques visiteurs. Un « namaste »** sonore et convaincu le fait sourire. Il répond en tournant vers nous un visage bienveillant et nous accueille sans façon.
Reprenant samedi l’avion pour Delhi, je passe avec les autres passagers par un tunnel sur roues installé au pied de la passerelle. Une énième fouille générale est effectuée, aimable et attentive. Sourire de l’agent me voyant porter des chaussures et un sac de montagne.
– « Alpinist ? Where did you go ? »
– « Langtang. Beautiful ! I’ll come back to Nepal ». « Dania bat!*** »
Tout content, je précise : « Next time, Nanda Devi ! » Je voulais dire « Ama Dablam ». Je les ai confondues, toutes deux sublimes. En fait la Nanda Devi est située en Inde… Je l’ai appris à mon retour en France. Comme si, quittant Londres, j’avais clamé qu’à ma prochaine visite je ne manquerais pas l’Empire State Building… Nous décollons juste avant l’arrivée de l’avion présidentiel chinois ; je ne resterai finalement pas bloqué à Katmandou en proie à la psychose policière. Bien au dessus de la mer de nuages, les grands sommets apparaissent, éblouissants. Plein ouest, l’avion longe les somptueux géants, bien distincts à notre droite. Je tente de deviner leurs noms et n’y arrive pas ; mal placé je me tords le cou pour mieux les voir. La forêt de smartphones et d’appareils photo couvre maintenant l’essentiel des hublots. Je songe à l’Ama Dablam. De mon siège, notre boîte à ailes se ferme sur l’Himalaya. Renonçant à en voir plus, je ferme les yeux. J’ouvre à nouveau la boîte à rêves.
Eric Desordre
* Refuges. Au Langtang, en particulier en altitude, ce sont souvent des cabanes ouvertes à tous les vents. Sur les routes les plus touristiques, le lodge peut être un hôtel au confort simple et accueillant.
** Bonjour
*** Merci